Curatore d'Arte

Sergio Ceccotti

Sergio Ceccotti S’il fallait expliquer (ce qui est toujours approximatif), la démarche de Ceccotti, il faudrait considérer que ce peintre est, en quelque sorte, le découvreur des mystères quotidiens, ceux précisément que la majorité des hommes n’est pas capable de découvrir elle-même. C’est ainsi que le peintre peut nous faire rêver ou nous faire peur.

Comme le proposait Baudelaire, c’est toujours la recherche de l’invisible, de l’impalpable, c’est le rêve permanent que l’on doit exiger d’un peintre, d’un poète, d’un musicien.

C’est donc ce que Sergio Ceccotti nous impose. Sans, d’ailleurs, se limiter à une représentation, à ce qu’on appelle un chromo. Chaque toile de Ceccotti pose délibérément une interrogation. Derrière la porte fermée d’une maison qu’il nous fait découvrir, c’est un monde inconnu, une vie secrète, un drame peut-être. Cette fenêtre allumée, c’est la preuve d’une existence qu’il nous fait imaginer.

Les objets que nous supposions familiers évoquent l’arrivée d’hôtes inattendus, des fantômes peut-être. Ceccotti réussit à nous faire pénétrer dans une chambre que nous n’avions connue que dans nos rêves. Quelqu’un nous attend. Cette femme est-elle aussi un fantôme?

Les objets qui nous attendent fidèlement les connaissons-nous? Ils nous offrent leurs services mais nous ignorions les secrets de leur fidélité. Sont-ils des amis ou des ennemis? Cette machine à écrire, ce cendrier, ce gramophone, Ceccotti nous oblige à les interroger. Une lampe voilée devient “l’inspiratrice” d’un poème. Plus étrange, c’est la possibilité d’évoquer l’insomnie. Une femme lit près d’une lampe. Et tous ceux qui ne peuvent dormir ni nuit, ni jour, seront délivrés. Une hallucination, peut-être. Des souvenirs… Et l’intimité. Aussi le désir, l’attente, la patience. Si l’on quitte les chambres hantées pour choisir les avenues de la grande ville, on se heurte à un nouveau mystère. Peindre la nuit dans une ville est une gageure que peu de peintres ont réussi à soutenir. Puis, c’est l’aube dans l’avenue encore endormie. L’heure de l’incertitude ou de l’espérance d’une prochaine journée. C’est bientôt le crépuscule. C’est aussi l’attente, l’angoisse des quais d’une petite gare. La solitude d’une voyageuse sans doute abandonnée. Le jour se lève… et Ceccotti, infatigable, va rechercher, au cours de ses promenades romaines ou parisiennes, les royaumes de l’insolite.

PHILIPPE SOUPAULT, 1982

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